Un sujet qui me tient particulièrement à coeur ...
Victime emblématique de la catastrophe de Ghislenghien, Stéphane Delfosse se livre dans un ouvrage rempli d'espoir.
ATH "Ghislenghien, tu te souviens ?" C'étaient les premiers mots que Stéphane Delfosse a entendus dans la bouche de son épouse, Anne, en sortant du coma, quatre mois après la catastrophe qui avait coûté la vie à 24 personnes et avait blessé à des degrés divers 123 autres.
Enquêteur à la police d'Ath, cet homme à l'humour décapant se trouvait au point zéro de l'explosion.
Même s'il n'aime pas trop ce mot, Stéphane Delfosse apparaît comme un miraculé. "On ne voulait probablement pas de moi là-haut, dit-il. Je ne méritais pas plus que les 24 autres personnes qui ont trouvé la mort dans cette catastrophe de m'en sortir. J'ai seulement eu beaucoup de chance. Même si cela peut paraître bizarre, c'est comme si j'avais gagné dix fois à l'Euromillions !"
Ce bientôt quadragénaire, brûlé à 70 %, profite de chaque instant de l'existence, malgré un avenir qu'il sait difficile. "J'ai déjà subi 29 interventions chirurgicales et je devrai encore être opéré plusieurs fois. Mais je peux compter sur ma femme qui, infirmière de formation, me soigne très bien, mes deux filles et aussi le soutien de nombreux amis d'avant et après Ghislenghien. Depuis ce jour, je me suis rendu compte que les gens pouvaient être bons."
Cet espoir, décisif à ses yeux, Stéphane Delfosse a voulu le faire ressentir dans un ouvrage qui paraîtra à la fin de la semaine prochaine.
Ce livre, basé sur des entretiens quotidiens durant deux mois et écrit par notre confrère Marcel Leroy, fait également la part belle à l'enquête. "Nous avons recherché et retrouvé, sauf la toute première, les personnes qui se sont occupées de moi dans la foulée de l'explosion. Sans leurs choix judicieux et leurs compétences, je ne serais plus de ce monde. Normalement, avec les brûlures que je présentais ce jour-là, le corps médical ne peut plus rien faire... Tous ces gens ont contribué à mon sauvetage."
Sur les responsabilités de la catastrophe, la victime ne veut pas se prononcer et laisse le soin à la justice de faire son devoir. "J'insiste sur le verbe. Je regrette les incompétences de certains, mais je ne leur en veux pas. Par contre, ceux qui ont profité et profitent encore de ce drame me mettent en colère ! Avec Marcel Leroy, nous constatons néanmoins dans l'ouvrage que les enseignements de ce jour funeste n'ont toujours trouvé aucune application concrète sur le terrain !"
Le 30 juillet prochain, jour anniversaire, Stéphane Delfosse se rendra à la cérémonie de commémoration. "C'est un devoir de mémoire, mais je ne suis pas un homme attaché aux symboles. Ghislenghien, c'est tous les jours pour moi. Je veux aller de l'avant et, comme je le dis dans le livre, je ne désespère pas de retravailler un jour, même si je vais être mis en incapacité totale permanente à la police."
Ghislenghien, tu te souviens ? aux Éditions Luc Pire.
C. Li.